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Appel à communications
Dans le cadre de cette nouvelle étape du cycle que nous consacrons aux pratiques contemporaines des émotions littéraires, et dont l’argumentaire est repris ci-dessous, nous avons décidé cette fois de nous intéresser aux espaces d’expositions et lieux de mémoires littéraires – expositions temporaires, musées, maisons d’écrivain, lieux et monuments dédiés à la littérature – et aux émotions spécifiques qu'elles suscitent, orchestrent, définissent et légitiment (ou non), dans leur relation à la littérature. La question de l’émotion suscitée par le lieu, par l’objet, en rapport avec sa « qualité » littéraire, est un lieu commun, un point de convergence. Elle caractérise aussi bien la réception, telle qu’elle s’appréhende dans les récits et les discours des visiteurs, que la conception et la « production » de ces espaces telles qu’elles se révèlent dans les propos des professionnels. Et presque toujours, ces émotions invoquées, ou provoquées, sont de l’ordre de l’indicible, du labile, et le rapport à la littérature indécis. Qu’est-ce qui, dans l’ « esprit du lieu » relève de la littérature ? Qu’est ce qui, dans cette mise en présence – et en scène – de l’objet patrimonial, relève (encore) de la lecture ? Si ce qu’on trouve là peut relever de la trace d’un geste d’écriture, d’un vestige de l’acte de création, ce n’est pas toujours, ni nécessairement, ni directement, le cas. L’espace comme l’objet peuvent avoir à la littérature un rapport de type métonymique, mimétique, métaphorique : indice, icône ou symbole. Tension entre une « réalité augmentée » par le souvenir, le fantasme ou le désir de lecture, et l’ancrage ou la « stabilisation » dans un monde tangible et partagé de cet espace proprement littéraire, fictionnel ou non. Quel rapport ces émotions « patrimoniales » entretiennent-elles avec les réminiscences de lectures passées, et/ou le projet de lecture à venir ? Quel rapport le lieu (maison, musée, exposition) et les objets présentés, authentiques ou non, entretiennent-ils avec cet espace intangible qu’est celui du « littéraire » ? On s’intéressera spécifiquement à ces embrayeurs entre l’espace réel de la visite, ou de la déambulation, et l’espace intime du souvenir de lecture, et/ou de l’univers, fictionnel ou non, de l’œuvre. On peut ainsi envisager l’émotion littéraire, née de la lecture effective du texte, ou du rêve de lecture, comme « matière » muséographique, que l’on peut à loisir programmer, scénariser, scénographier. Enfin se pose la question de la dimension collective du lieu. Seul face à son livre, le lecteur devenu visiteur entre dans un espace ouvert à d’autres. Pour autant, l’émotion « littéraire » y devient-elle ipso facto partagée, ou partageable ? Comment les activités proposées dans ou autour de ces espaces (ateliers d’écriture, résidences d’élèves, ateliers ou cercles de lecture, spectacles, etc.) travaillent-elle ce rapport intime à la littérature ? Emotion(s), donc, mais de quelle nature ? de quelle portée ? A quelles fins ? Au centre de notre réflexion, résolument interdisciplinaire, des pratiques, aussi bien celles des visiteurs (lecteurs ?) que celles des professionnels qui pensent et font ces lieux, ces événements. Les interventions pourront ainsi tout aussi bien proposer des études de cas – expositions, maisons d’écrivain, lieux de mémoire – que des approches plus théoriques, selon des perspectives d’analyse touchant aussi bien à la muséographie, à la scénographie, à la médiation, qu’aux théories de la lecture, de la réception, et de la littérature.
Modalités de soumission Vous ferez parvenir vos propositions de communication (titre, résumé de 150 mots, brève notice biographique) pour le 15 juillet 2016 via le site https://elopc.sciencesconf.org Contact : emotionslitteraires@gmail.com Comité d’organisation Bérengère Voisin, laboratoire « Littérature, Histoires, Esthétique », EA 7322, Université de Paris 8 Vincennes-Saint-Denis Aurélie Mouton-Rezzouk, Institut de Recherches en Études Théâtrales, EA 3959, Univer- sité de Sorbonne Nouvelle — Paris 3 Sylvie Gonzales, Musée d’Art et d’Histoire de Saint Denis **************************************** Le cycle « Les émotions littéraires : Observatoire des pratiques contemporaines » Le projet de recherche «Les émotions littéraires : observatoire des pratiques contemporaines», a pour visée de rendre compte des formes de vie de la littérature dans le monde contemporain et au sein de la cité. Il ne s’agit pas tant de contribuer à la défense de l’objet littéraire que de l’observer dans ses pratiques, ses interactions avec le monde hors du champ qui lui fait encore une place institutionnellement et dans un parcours de formation : le scolaire et l’universitaire. Afin de circonscrire un certain type de manifestations, nous l’étudierons sous l’angle des émotions que la littérature peut générer. A l’instar de Georges Didi-Huberman qui cherche à décrire devant un public d’enfants le caractère traversant et la force agissante de l’émotion : «Ton émotion est-elle seulement à toi ? N’est-ce pas quelque chose de très ancien qui devient, tout à coup, présent dans ton corps? Et n’est-ce pas aussi le début d’une action qui transformera le monde?», on se demandera quelles sont aujourd’hui les formes vivantes de la «matière-émotion » dont parle Michel Collot2. Qu’en est-il aujourd’hui de l’émotion poétique provoquée «par ce qui est dit, certes, mais surtout par la façon dont c’est dit, le timbre sur lequel c’est dit»? Qu’en est-il de l’émotion littéraire, celle qui fait éprouver au sujet une expérience émotionnelle par un déplacement des points de vue ? Qu’est-ce qu’une surprise émotionnelle générée, en lien avec la littérature ? Comment, dans quels lieux, face à quel public l’encourager? Peut-elle être une réelle «matière» dans un processus de création et/ou de réception? Ce projet s’inscrit doublement dans le champ de la contemporanéité : 1) Il nous importe de témoigner des lieux, des espaces, des pratiques dans lesquels l’individu d’aujourd’hui peut faire l’expérience des émotions littéraires, de s’interroger sur leurs caractéristiques, leurs manifestations, la manière dont elles sont pensées, utilisées, encouragées et à quelles fins. D’une certaine manière il s’agira de parler de la vitalité de la littérature, de ce qu’on peut en «faire» ailleurs qu’à l’école ou à l’université et en dehors, d’une lecture individuelle et privée. Ce qu’on peut dire des formes de survivances (résistances ?) du littéraire dans l’espace collectif d’aujourd’hui et tout particulièrement du rôle qu’y jouent les émotions revient à interroger ce qui dans la littérature participe de la construction, par des pratiques spécifiques, d’un vécu commun, d’un monde partagé4. Il sera peut-être ainsi possible de mieux décrire la force d’une expérience esthétique au sens où Dewey la concevait : une expérience limitée dans le temps, mais qui résonne au-delà de ce temps, qui permet au sujet d’apprécier sa condition de vivant, «un des moyens par lesquels nous entrons, par l’imagination et les émotions (...) dans d’autres formes de relations et de participations que les nôtres»5. 2) A la lumière des travaux récents consacrés aux émotions en sciences cognitives, en philosophie, en sociologie de l’art, en esthétique et en littérature, nous voudrions mettre en regard ce qui relève d’une part de la connaissance aujourd’hui plus fine, plus complexe, des liens qui se nouent entre les processus cognitifs (interpréter, comprendre, analyser, percevoir, mémoriser...) et l’expérience émotionnelle, et ce qui relève d’autre part de pratiques, dans des domaines aussi variés que la médecine, le patrimoine et l’art contemporain. 1 Georges Didi-Huberman, Quelle émotion ! Quelle émotion ?, Bayard Jeunesse, Paris 2013, coll. « Les Petites conférences ». |
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